L’analyse du déficit public ne fait pas l’unanimité

Lundi 2 septembre, le ministère des Finances a provoqué une impressionnante levée de boucliers parmi les élus locaux. Le contenu d’un courrier adressés aux parlementaires, sur le déficit attendu du budget public 2024 a été très commenté, notamment par l’Association des maires de France.

Destinataires du courrier ministériel, les rapporteurs généraux et les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont appris que le déficit 2024 de la France sera plus important que prévu. Bruno Lemaire, ministre démissionnaire des Finances, et Thomas Casenave, ministre délégué aux Comptes publics, estiment que « le risque principal est lié à une augmentation extrêmement rapide des dépenses des collectivités locales, qui pourrait, à elle seule, dégrader les comptes 2024 de 16 milliards d’euros ». Ce chiffre est présenté en opposition aux 30 milliards d’euros à venir de baisse des recettes du fait d’une croissance faible, de l’ordre de 1,1 %.
Les réactions ont été nombreuses et rapides, beaucoup de maires étant sollicités par les médias locaux et régionaux. Dans un long communiqué publié le 3 septembre, l’Association des maires de France (AMF) dénonce « une mise en cause des collectivités infondée pour masquer la situation des comptes de l’État ».
D’abord pédagogique, le texte rappelle que : « les collectivités territoriales, malgré des erreurs de gestion qui peuvent toujours exister, ne sont pas le problème des comptes publics. Les finances locales sont obligatoirement à l’équilibre […]La dette des collectivités est stable depuis 30 ans voire en légère diminution, passant de 9 % du PIB en 1995 à 8,9 % en 2023, et elle ne finance que de l’investissement. Les dépenses des collectivités, malgré le « millefeuille administratif » qui caractérise la France, représentent moins de 12 % du PIB contre 18 % pour la moyenne européenne. […] Beaucoup de ces dépenses résultent d’obligations nouvelles que le gouvernement et le Parlement ont mis à la charge des collectivités ces dernières années, par exemple dans le domaine environnemental, dans celui de la petite enfance, des transports, ou de façon plus insidieuse en matière de sécurité, et de toutes les obligations normatives et bureaucratiques qu’impose l’État aux collectivités. »

« Rompre avec les discours stigmatisant les collectivités locales »

La fin du communiqué ne laisse aucun doute de l’état d’esprit des responsables de l’AMF vis à vis du ministère des Finances : « Cette mise en cause grossière, par les ministres responsables de la dérive des comptes publics, de l’action des collectivités locales, qui restent un pôle de stabilité démocratique dans le contexte de blocage actuel des institutions, oublie de préciser que les collectivités locales ont participé de longue date à la réduction de la dette publique sans que pour autant l’État ne parvienne à maîtriser la dérive continue de ses propres comptes ».
C’est au nouveau gouvernement qu’il revient « de modifier le cas échéant les éléments préparés, à la fois en matière de recette et de dépense », prévenaient les ministres démissionnaires dans leur courrier du 2 septembre. Trois jours plus tard, la nomination d’un Premier ministre était annoncée. Elle a été saluée par un nouveau communiqué de l’AMF, souhaitant à Michel Barnier « de réussir à mettre en œuvre des mesures concrètes pour surmonter les défis auxquels la France est confrontée. Portée par l’ensemble des élus locaux, la liberté locale, qui implique les moyens financiers et la capacité juridique d’agir des collectivités, reste prioritaire, car elle est une source d’efficacité de l’action publique et de vitalité démocratique. Le nouveau Gouvernement doit établir un dialogue de confiance pour relancer la décentralisation et rompre avec les discours stigmatisant les collectivités locales ».