Le 5 mars, les magistrats du Tribunal administratif de Grenoble ont rejeté les arrêtés du maire d’Aussois autorisant la construction d’un nouveau télésiège sur le domaine skiable de la station-village. Passé la surprise, les dirigeants de la société publique locale gérant les remontées mécaniques et les élus ont choisi de communiquer et de profiter de la fin des vacances scolaires pour appeler à la mobilisation.
Samedi 9 mars, plus de 250 personnes ont répondu à l’invitation à se rassembler pour dire « Oui au remplacement du télésiège de la Fournache, nous voulons vivre et travailler en Maurienne ». L’appel a été entendu au-delà des limites de la commune, de nombreux élus et professionnels des stations de Haute-Maurienne et d’autres venus de la vallée ont rejoint le mouvement.
Élus et habitants sont vent debout face au rejet systématique des projets d’aménagement touristique de la vallée de la Maurienne.
Le projet de construction, dont les travaux avaient déjà commencé, est porté par la commune d’Aussois et la société publique locale Parrachée Vanoise « pour préserver l’activité économique du village et rester accessible au plus grand nombre (accueil des familles, classes de neige, …). Alors que les recours portent sur l’aspect environnemental du dossier, l’aspect économique n’a pas été pris en compte et pourtant, l’activité ski du village-station d’Aussois génère environ 300 emplois directs », expliquent les initiateurs du projet.
« Nous devons défendre ce modèle »
« Face au sérieux de notre projet, nous ne comprenons pas cette décision. Nous avons constitué ce dossier avec rigueur, en prenant en compte l’avis de l’autorité environnementale, après une enquête publique ayant recueilli 111 observations et un avis favorable du commissaire enquêteur, ce qui nous a permis d’obtenir la délivrance des permis de construire et d’aménager. Le renouvellement et la modernisation des infrastructures sont une condition essentielle au maintien de l’attractivité des petites stations familiales. Nous devons défendre ce modèle pour préserver l’accessibilité au ski à tous les Français. La crise agricole voit les exploitations péricliter en raison de lourdeurs administratives, de pressions extérieures, faut-il aussi une mobilisation pour « sauver » les petits exploitants des domaines skiables ? », interrogeait Stéphane Boyer, maire d’Aussois, le 6 mars.
Le succès du rassemblement du samedi 9 mars lui a peut-être apporté un élément de réponse.
LES ASSOCIATIONS SALUENT LA DÉCISION
France Nature Environnement Rhône-Alpes et France Nature Environnement Savoie, à l’origine de la requête en annulation présentée devant le Tribunal administratif, ont une lecture différente de la situation.
« Les extensions de domaines skiables déguisées en remplacements de remontées mécaniques se font de plus en plus fréquentes. Le projet de remplacement du télésiège de la Fournache à Aussois en est un exemple criant : l’ancien télésiège aurait été démonté et le nouveau aurait suivi un tracé complètement différent, avec de nouvelles pistes sur un site encore vierge d’équipements en altérant lourdement le magnifique paysage du sentier de grande randonnée GR5. La justice a dit non ! », constatent les responsables des associations dans un communiqué commun.
Le sujet dépasse le seul cas d’Aussois et la décision du Tribunal administratif. Les prises de position récentes sont plutôt défavorables à la montagne aménagée. « Nous saluons cette décision de justice qui plaide, comme le rapport de la Cour des comptes et le rapport du député Joël Giraud, pour un changement profond du modèle économique montagnard, qui ne soit plus basé sur le pillage des ressources naturelles par la mono activité « ski alpin ». L’extension continue des domaines skiables, qui alimente une urbanisation sans fin et génère la consommation de gigantesques volumes d’eau pour faire de la neige artificielle, n’est pas soutenable », affirment les responsables associatifs.
« Les stations de ski seront percutées de plein fouet par le réchauffement climatique. Quand vont-elles enfin cesser leur fuite en avant et sérieusement penser à s’adapter ? » interroge Eric Feraille, pilote des réseaux Montagne et Juridique de France Nature Environnement Auvergne-Rhône-Alpes.
EN SAVOIR PLUS :
Lire la décision du Tribunal administratif
Le rapport de la Cour des comptes
Le rapport de Joël Giraud