Aux beaux jours, bords de lacs, forêts, pelouses alpines et autres sites naturels remarquables des pays de Savoie enregistrent d’importants pics de fréquentation. Un phénomène qui s’est amplifié depuis la pandémie. Combiné à des comportements parfois inappropriés, il porte atteinte à l’environnement, à la qualité de vie des habitants, mais également à l’expérience touristique. Pour juguler le trop-plein de visiteurs et encourager les bonnes pratiques, les territoires balancent entre pédagogie et coercition.
Dans les Pays de Savoie, comme dans beaucoup d’autres départements français, il y a un avant et un après-Covid en terme de fréquentation des espaces naturels. « Il existait déjà une forte fréquentation locale avant la pandémie, mais depuis, dès lors que la météo est clémente, nos territoires voient grimper en flèche le nombre de visiteurs à la journée, originaires des grands centres urbains de la région (Lyon, Grenoble et Genève) », témoigne Nicolas Mercat, maire de Bourget-du-Lac. La commune en rive ouest du lac du Bourget reçoit jusqu’à 10 000 personnes l’été en jours de pointe. C’est deux fois plus qu’avant 2020. Des pics d’affluence qui ont leurs lots de désagréments. En tête du palmarès des nuisances, sans surprise, le stationnement anarchique. Il crée des engorgements du trafic le long du lac et empêche régulièrement les véhicules de sécurité de passer.
Après concertation avec les visiteurs et les Bourgetains, la commune a décidé cette saison d’adopter elle aussi le principe du stationnement payant l’été. Mais uniquement pour ses parkings les plus proches de la plage (1€ par heure, puis 2€ à partir de 4 heures de stationnement).
Faire contribuer financièrement les visiteurs
Cette pratique est déjà adoptée, depuis 2021, à Annecy, et elle est courante chez nos voisins italiens, où le prix du ticket est plutôt dissuasif. « L’idée n’est pas d’empêcher les visiteurs de venir au Bourget-du-Lac ni de faire de l’argent avec les parkings, mais de favoriser la rotation du stationnement à proximité du lac et des commerces », assure Nicolas Mercat, jugeant aussi qu’il est normal que les visiteurs contribuent aux charges pesant sur sa commune de 5 000 habitants. Les recettes des parkings permettront de financer la gestion et l’amélioration de l’accueil des visiteurs (toilettes, cheminements piétons, services de sécurité…).
Au Bourget-du-Lac, si le stationnement proche du lac est payant, le stationnement plus lointain reste gratuit. « À Savoie Technolac, à seulement 10-15 minutes de marche à pied très agréable le long de la Leysse, il y a 5 000 places de parking en libre-accès, dont 500 publiques », rappelle son premier magistrat, précisant que les effectifs de la police municipale monte à six agents en juillet-août…
Jusqu’à présent, dans la gestion des flux touristiques, le volet répressif était manié avec doigté, en raison des retombées économiques. Mais, les comportements inadaptés et illicites de certains, associés à une fréquentation massive, conduisent les acteurs terrain à recourir à la coercition lorsque la pression sur un site est trop forte.
Réguler le bivouac
Depuis la pandémie, l’appel de la nature –aidé par la mise sur le marché de tentes légères vite installées–, a par exemple rendu le bivouac populaire bien au-delà du cercle des randonneurs. Cette pratique, tolérée du coucher du soleil au lever du jour sauf arrêté ad hoc, n’est pas sans conséquence sur des milieux naturels jusqu’ici préservés. « Au bord des lacs d’altitude les plus prisés de nos réserves naturelles, nous avons comptabilisé jusqu’à 120 tentes certains soirs, alors que les gardes estiment que certaines zones de bivouac ont une capacité d’accueil pour 35 places maximum ! », souligne Juliette Buret, chargée de projets écotourisme à Asters, le Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Savoie.
Dans le cœur du Parc national de la Vanoise,
la réservation de son bivouac est obligatoire.
©Mylène Herrmann/Parc national de la Vanoise
Les incidences que génèrent ces pics de fréquentation dans ces lieux sauvages, véritables refuges pour la biodiversité, sont multiples : nuisances sonores, abandon de déchets, biodégradables ou non, toilettes sauvages, piétinements, dilution de crème solaire dans les milieux aquatiques, survols intempestifs de drones…
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