Archive – Zones d’activités, innover sur le foncier

Le concours d’idées Mix’Cité vise à promouvoir les pratiques permettant d’optimiser le foncier dans les zones d’activités. En Haute-Savoie, Mix’Cité 3, initié en 2021 par plusieurs partenaires, a été achevé fin 2023. En 2025, Mix’Cité 4 se penchera sur le lien entre activités économiques et logement des salariés, autre problématique prioritaire du territoire.

© Actua Drone/Chambéry Grand Lac Économie

L’enjeu est majeur sur notre territoire où le foncier, rare et cher, freine l’implantation et le développement des entreprises. Il l’est plus encore à l’heure où la loi Zéro artificialisation nette (ZAN) demande aux territoires et collectivités de réduire de moitié le rythme de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030 par rapport à celle mesurée entre 2011 et 2020(1).
Dans ce contexte, l’Établissement public foncier (EPF) et le Conseil en architecture urbanisme et environnement (CAUE) de Haute-Savoie, en partenariat avec la chambre de commerce et d’industrie et la Direction départementale des territoires (DDT), ont initié le programme d’expérimentation Mix’Cité 3 en 2021. Le but ? Questionner les possibilités de densification et de requalification des zones d’activités économiques, sur un territoire contraint et assurer l’évolution du tissu économique en explorant la voie du renouvellement urbain.

ANNEMASSE ET RUMILLY : DEUX SITES PILOTES

Deux sites pilotes ont été retenus après appel à manifestation d’intérêt : les zones du Mont-Blanc (Annemasse) et de Balvay (Rumilly). La première, créée à partir de 1969 et gérée depuis 2019 par Annemasse Agglo, abrite près de 500 entreprises (plus de 4 600 emplois) sur un peu plus de 150 hectares. La seconde, lancée en 1980, accueille une trentaine d’entreprises, majoritairement dédiées à l’activité industrielle (48 %) soit 1 500 emplois.
Un concours d’idées a ensuite été initié auprès de six équipes de maîtrise d’œuvre pluridisciplinaire « pour identifier des leviers d’action, proposer des méthodes opérationnelles de requalification environnementale, urbaine et architecturale pour la densification et le renouvellement des deux zones retenues ». Avec notamment comme objectifs : une emprise bâtie de 50 % minimum (contre 20 à 30 % aujourd’hui), une mutualisation de services et de fonctions pour dégager de nouvelles disponibilités foncières… Deux lauréats ont été désignés début 2023 : le groupement Concorde, Ville en œuvre et Ateve pour la zone du Mont-Blanc, et le groupement Les Marneurs, Auxilia, Setec et Adenda pour celle de Balvay.

UNE PRISE DE CONSCIENCE

Et quid du résultat ? « Sur Rumilly, où un changement de présidence est intervenu entre-temps sur la communauté de communes, il y a eu une prise de conscience, avec la volonté d’optimiser le foncier pour les ZAE à venir et de réfléchir à une nouvelle stratégie qui, jusqu’alors, consistait à aménager puis à céder la propriété pleine et entière aux entreprises », explique Vincent Cézard, référent du programme à l’EPF 74.
Sur Annemasse, là aussi une prise de conscience est constatée, avec la volonté d’aller de plus en plus vers une mixité de fonctions, d’activités. « La zone du Mont-Blanc est insérée dans le tissu urbain. L’idée est de passer d’une ZAE à un quartier de ville, plus dense et plus mixte avec des commerces, des ateliers artisanaux de producteurs, des corridors écologiques, une mobilité repensée, des mutualisations, peut-être du logement… », explique le référent.

DES LEVIERS POUR AGIR

Dans cette expérimentation, pas de solutions clé en main, davantage des leviers sur lesquels agir. On parle alors de verticalisation des processus productifs, d’optimisation des espaces de stationnement, de mixité des usages sur un même lieu, de repérage de filières amenées à se réorganiser dans les dix ans, le tout sans perturber les activités existantes, en intégrant la dimension transition écologique et en veillant à la répliquabilité de la démarche. « À travers ce concours d’idées, nous voulons développer une forme de méthodologie à même d’être utilisée sur d’autres sites. Nous avons conçu une boîte contenant différents outils juridiques, financiers, réglementaires, pour permettre aux collectivités de disposer des leviers pour favoriser leurs projets de densification. »
Ce programme Mix’Cité 3 a d’ores et déjà un successeur, Mix’Cité 4 qui souhaite « réinterroger le lien entre activités économiques et logements des salariés, problématique importante en Haute-Savoie. Des territoires tests sont en cours de recrutement avant le lancement d’un nouveau concours d’idées ».
Ce programme associera, au-delà de l’EPF, le CAUE, la CCI et les services de l’État, tous les acteurs du logement et des représentants d’entreprises.

1.De nouvelles propositions ont été faites par le Sénat en novembre 2024 pour assouplir la mise en œuvre du dispositif ZAN (notamment l’abandon de l’objectif intermédiaire de 2031 et le report de l’obligation de la mise en compatibilité des documents de planification), mais tout est en stand-by à l’heure actuelle.

NOUVELLE JEUNESSE POUR LE BAIL A CONSTRUCTION
Le bail à construction a fêté ses 60 ans en 2024. Initié par l’État pour favoriser le développement de territoires dont il ne voulait pas aliéner la propriété, il est, depuis quelques années, remis au goût du jour par de nombreuses circonscriptions administratives. « Ce système, neutre en termes de budget pour la collectivité, permet de conserver un contrôle juridique plus fort de ce qui se passe sur le terrain », résume Régis Dormoy, directeur de Chambéry Grand Lac économie. « C’est comme la propriété, sauf qu’il y a une fin. »
Le principe est simple : un contrat est établi entre la collectivité qui met en location un terrain lui appartenant, et l’entreprise, qui le loue pour une durée déterminée afin d’y construire des locaux dont elle est propriétaire. La collectivité s’assure ainsi du maintien, dans le temps, de la vocation des surfaces qu’elle a subventionnées, afin d’éviter les spéculations reposant sur un changement d’affectation non encadré. Un outil intéressant à l’heure de la loi ZAN et dans une période où, d’une manière générale, « recréer du foncier industriel est difficile ». De surcroît dans un département où il se fait rare.
Il y a une bonne dizaine d’années, ce dispositif a été retenu pour la commercialisation de la ZAC 2 de Savoie Technolac (10 hectares, pour une durée de 99 ans). Fort du résultat de cette initiative alors novatrice, les élus de Chambéry-Grand Lac économie ont adopté, le 16 décembre 2022, cet outil comme modalité unique de commercialisation des terrains situés en ZAE, pour une durée ramenée à 60 ans afin de disposer d’une meilleure visibilité.
« L’enjeu, c’est la densification. Les terrains économiques de Chambéry et Grand Lac sont construits à hauteur de 25 %. Il faudrait passer à 31 % si nous voulons bâtir autant de mètres carrés dans les dix prochaines années que dans les dix dernières. » Le dispositif fait école : Régis Dormoy a déjà répondu à une centaine de sollicitations sur le sujet ! Un livre blanc est par ailleurs à disposition des entreprises pour les aider à aller vers plus de densification.

EN SAVOIR PLUS
LE BAIL À CONSTRUCTION
chambery-grandlac.fr