Pour certains, le Salon des maires et des collectivités locales 2025 et le congrès annuel des maires de France se jouaient sur l’air de la « Dernière séance » d’Eddy Mitchell. D’autres tournaient parmi les fournisseurs pour mettre en musique leurs projets pour 2026-2032, sans être complètement sûrs d’être encore au casting après le 15 mars. Mais les maires sont des gens optimistes !

Un qui avait plus que d’autres la sensation de la précarité des choses était le Premier ministre, Sébastien Lecornu, venu conclure le congrès des maires de France après les interventions d’André Laignel et David Lisnard.
Maire d’Issoudun depuis 1977 et premier vice-président de l’AMF, André Laignel revint sur un mandat difficile, où les maires ont été mis à rude épreuve, du Covid aux conséquences de la guerre en Ukraine. « Premiers témoins des fissures de la République », les maires ont tenu, face à la pandémie, à l’inflation, aux injonctions contradictoires de l’Etat, aux évènements climatiques. Soulignant la recentralisation rampante, financière d’abord avec la confiscation fiscale liée à la suppression de la TH, de la CFE, administrative, avec toujours de nouvelles contraintes et des transferts de charges « nous mettant en situation de vassalisation », André Laignel soulignait la difficile position des maires, pris entre « les besoins d’en bas et les contraintes d’en haut ». La solution ? La liberté pour les communes (le thème du congrès), avec une clause de compétence générale affermie, et la décentralisation réelle comme moyen d’atteindre cette liberté.
Du vice-président de gauche au président de droite, le discours restait identique : celui de maires confrontés aux mêmes difficultés. David Lisnard se félicitait du succès de ce dernier congrès du mandat, avec notamment une intervention du chef d’état-major des armées « qui n’a pas laissé indifférents ». Tout au long de son intervention, le président de l’AMF soulignait le rôle pionnier des maires, premiers à comprendre les impacts réels des textes votés au parlement, que ce soit sur le logement, les DPE, le ZAN ou le narco trafic. « Nous faisons un énorme travail sur la sécurité, les polices municipales, même si c’est du régalien et que l’Etat a été inventé pour ça ».
De la liberté !
Face à un public conquis, David Lisnard rappelait quelques vérités : les communes n’empruntent que pour investir, la « schématocratie » nous envahit (à propos des SRADDET et autres schémas divers et variés), chacun pouvant tout bloquer sans permettre à quiconque d’avancer. « Avant, nous regardions ce qui était interdit, aujourd’hui nous cherchons ce qui est autorisé » dit-il avant de souligner que les grandes fiertés de la Nation sont désormais gérées par des lois d’exception s’exonérant du cadre administratif habituel : reconstruction de Notre Dame, Jeux olympiques de 2024 (et de 2030 ?).
Contrairement à d’autres, les maires, « urgentistes de la République », sont de « petits diseux, mais de grands feseux », le maire de Cannes inversant un vieux proverbe normand… rappelant que les élus de base ont souvent « une vision à dix ans de leur territoire face à un gouvernement qui ne sait pas s’il sera encore là ce soir » David Lisnard plaida lui aussi pour une vraie décentralisation, et pour que les élus locaux ne se fassent pas transférer l’impopularité fiscale (les budgets communaux devant être à l’équilibre, la seule solution restant désormais est souvent de taper sur les propriétaires…). Autonomie, responsabilité, efforts : les mots étaient clairs, avant de clore par une minute de silence en mémoire des victimes des attentats du 13 novembre 2015…

Marina Ferrari, ministre de la Jeunesse et des Sports, a accueilli les maires de Savoie présents à Paris. L’ancien Premier ministre Michel Barnier et Luc Berthoud, président de l’Association des maires de Savoie étaient présents à ses côtés.

Marina Ferrari est très impliquée dans le dossier des JO de 2030.
Protéger sans bloquer…
Ancien maire de Vernon, Sébastien Lecornu pouvait partager une connaissance du terrain avec les maires rassemblés. Usés par le poids des règlements, les maires ? Le premier ministre rappela une réalité : la forte demande sociétale de protection. Y compris en mairie. Au moindre problème, on prend un arrêté. On règlemente. On interdit. « Tout le monde agit en défensif face à la judiciarisation de la société » en soulignant aussi « que les magistrats appliquent la loi, même si elle est mal écrite »…
Mais il promit aussi une loi avant Noël sur la décentralisation, pour clarifier les compétences. «Il y a trop de cuisiniers dans la cuisine, et on sait plus qui fait quoi ». Reste à voir si la précipitation est toujours bonne conseillère en matière de partage des compétences territoriales….

Les élus de Savoie ont visité Notre-Dame.
Simplifier, enfin ? Reconnaitre, enfin ?
Une série de « méga décrets » serait en préparation pour simplifier une centaine de normes et d’exigences diverses pesant sur la vie locale. Le premier ministre a promis qu’avant Noël un méga décret concernerait trente mesures de simplification, avec un inventaire à la Prévert mais susceptible de plaire aux maires : étalement des dates pour les « décrets tertiaires », prolongation et hausse pour les seuils liés à la commande publique, allègement du contrôle de légalité sur les mesures de RH, suppression de l’obligation de vidange annuelle des piscines municipales, réunions en visio des CDCI et des CDAC. Septante autres mesures similaires devraient être prises en janvier et février.
Sébastien Lecornu a aussi annoncé une loi sur les polices municipales avant les élections, concernant y compris les gardes champêtres. Le statut de l’élu devrait sortir aussi, et il a annoncé la création d’une prime régalienne pour les maires, en reconnaissance du travail fait au nom de l’Etat. Le montant serait uniforme, quelle que soit la taille de la commune, autour de 500 euros l’an.
Le tout serait d’avoir un gouvernement qui tienne jusque-là. Et un budget qui permette aux communes de suivre les éventuelles améliorations des plafonds indemnitaires des élus communaux…

